La consolidation des gérants indépendants devrait s’accélérer

Acquisition

Il y avait foule le 17 mars dernier à l’Hôtel Métropole pour assister à la conférence consacrée aux fusions et acquisitions chez les gérants indépendants, organisée par Kasavi Advisory et OA Legal.

Il faut dire que le sujet est d’une actualité brûlante car le temps presse pour que les gérants indépendants soumettent leur demande d’autorisation à la FINMA.

Or, comme l’a indiqué le mois dernier le régulateur lors d’un séminaire à l’intention des gérants indépendants et des trustees, sur un total de 2’521 sociétés concernées, seules 297 demandes d’autorisation lui ont été transmises, ce qui représente moins de 12%. Et sur ces 297 demandes, seules 157 autorisations ont été octroyées.

Compte tenu des délais de préparation des dossiers et d’examen des demandes, il y a fort à parier que de nombreux gérants indépendants ne parviendront pas à obtenir leur autorisation avant la fin de l’année et qu’ils ne pourront donc plus exercer leur activité. 222 établissements, soit 13%, ont d’ailleurs déjà informé la FINMA qu’ils ne soumettraient pas de demande d’autorisation. Ces établissements n’auront plus que deux solutions : mettre la clé sous la porte ou s’associer à un partenaire au bénéfice d’une licence, sous forme d’une fusion ou d’une vente.

La question de la taille critique

Tout comme les banques privées, les sociétés de gestion indépendantes sont confrontées, d’une part, à une hausse des coûts opérationnels – en raison du durcissement des contraintes réglementaires et des exigences accrues des clients en termes d’efficacité administrative et technologique – et, d’autre part, à une pression sur les revenus, en raison de la disparition du secret bancaire et donc d’une augmentation de la concurrence internationale.

Face à cet effet ciseau, les gérants indépendants sont ainsi contraints de grandir pour atteindre la taille minimale qui leur permet de rester rentables. Même si cette masse critique est très variable en fonction du modèle d’affaires, les spécialistes s’accordent généralement à dire que la barrière des CHF 1 milliard d’actifs constitue un seuil réaliste pour permettre une croissance future et envisager l’avenir avec une certaine sérénité.

En se basant sur sa base de données et sur différentes sources supplémentaires, Kasavi Advisory estime que seules 106 sociétés de gestion atteignent ce montant en Suisse, soit environ 6% du total. En d’autres termes, il y aurait plus de 1’600 établissements qui sont trop petits pour survivre à moyenne échéance. La seule solution : grandir par fusions ou acquisitions pour dépasser la barre fatidique.

Des fondateurs atteints par la limite d’âge

Un autre défi à relever pour les GFI est celui du changement de génération de leurs dirigeants. En effet, une grande partie des sociétés de gestion indépendantes sont des entreprises de première génération, dont les fondateurs arrivent à l’âge de la retraite. De fait, Kasavi Advisory estime que 35% des établissements ont été créés il y a plus de 20 ans. Si l’on suppose que leurs fondateurs avaient dépassé la quarantaine au moment de se lance, ce sont quelque 700 gérants indépendants au total qui doivent aujourd’hui passer la main et trouver un successeur ou un repreneur.

Des transactions difficiles à conclure seuls

Compte tenu de tous ces facteurs, l’industrie devrait donc déjà être passée par le même processus de consolidation qu’ont connu les banques privées. Or, même si le rythme semble un peu plus rapide depuis quelques mois, les transactions restent encore rares. Trop rares en tout cas pour répondre à temps aux nombreux défis énoncés ci-dessus…

Pourquoi donc ? Tout simplement parce que la plupart des gérants indépendants pensent trouver leur partenaire de fusion ou de reprise en se servant simplement de leur réseau. Ainsi, un gérant indépendant songeant à un mariage de raison avec l’un de ses concurrents aura tendance à prendre contact à 2 ou 3 concurrents-amis avec lesquels il sent une affinité. Autour d’un déjeuner, il va discuter à mots plus ou moins couverts pour évaluer l’intérêt de son partenaire potentiel. Si tout va bien, ils vont convenir qu’il vaut la peine d’en discuter plus avant. Puis, comme lors d’un rendez-vous amoureux, chacun va attendre que l’autre fasse le premier pas, pour ne pas se placer en position de faiblesse. Si on ajoute à cela les pressions des marchés et des clients qui laissent peu de temps libre pour mener à bien de genre de projet majeur, on comprend que rien ne se concrétise, d’autant qu’après quelques mois, le projet perd son momentum initial et s’enlise, sans même qu’on arrive au moment critique des questions de prix, de contrats et d’évaluation des risques

L’assistance indispensable de professionnels

Tout change si l’on fait appel à des conseillers extérieurs, mandatés spécifiquement pour trouver un repreneur et mener la transaction à bien. Dans ce cas, le processus se professionnalise et s’accélère. Un appel d’offres limité dans le temps est organisé. Des fiches descriptives de la société sont préparées et envoyées à une liste de cibles définies, les clauses de confidentialité signées, les données chiffrées fournies, les due diligences effectués, les offres évaluées et les négociations engagées. Des accords sont ensuite rédigés, puis signés. Dans un délai de 9 à 12 mois, une transaction peut ainsi être conclue à la satisfaction des parties prenantes, souvent à un prix supérieur à celui escompté au départ par le vendeur.

Bref, comme tout serait plus simple, si on laissait les égos au vestiaire pour faire confiance à des experts !